Musiques du monde, Beihdja Rahal

 

   
     
 

Cette femme de caractère à la frêle voix cristalline chante un répertoire réservé aux hommes dans le Maghreb contemporain. Pourtant, dans les palais de l'Espagne d'avant l'Inquisition, où sont nées les Noubas arabo-andalouses, les voix de femmes étaient très prisées. Cela explique sans doute qu'aujourd'hui des hautes-contre les aient remplacées.

Beihdja Rahal, née à Alger dans une famille de mélomanes, a été formée au luth-kuitra par de grands maîtres du classicisme arabo-andalou. Elle n'est pas la première femme à briser le tabou. Avant elle, Reinette l'Oranaise a mêlé les répertoires classique et populaire, alors que l'orchestre de femmes de Tétouan, au Maroc, et l'ensemble Es-Sendoussia, d'Alger, s'en tenaient aux anciennes Noubas.

Pour pouvoir chanter J'avais un amant ou Sous la protection de la passion, Beihdja Rahal a renoncé à la vie de femme rangée à laquelle sa licence de biologie lui permettait de prétendre. Elle interprète ici la Nouba Zidane qui se joue en pleine nuit et qui a inspiré Camille Saint-Saëns pour la bacchanale de Samson et Dalila.

A ses côtés, deux oudistes, un violoniste et un percussionniste: Beihdja Rahal a renoncé aux orchestres pléthoriques si à la mode ces dernières années et renoue avec les formations de chambre qui laissent place aux improvisations.

 

Eliane Azoulay
"TÉLÉRAMA" 14 février 1996