Beihdja Rahal joue des noubas à l'opéra  
     
     
 

Le jeune Orchestre arabo-andalou d'Anjou et Beihdja Rahal s'associent pour un concert, vendredi, à l' opéra Graslin, dans le cadre du cycle Voix du monde.

Musiques du monde. C'est l'une des grandes interprètes de ce répertoire classique du monde musulman de la Méditerranée, fondé sur une haute tradition poétique et musicale que les artistes réunis au sein de l'Orchestre arabo-andalou de l'Anjou vont pouvoir approfondir encore grâce à cette rencontre exceptionnelle.

Trois questions à Beihdja Rahal, chanteuse et joueuse de mandoline et de kuitra :

Comment est née votre passion pour ce répertoire ?

Je vis en France depuis trente ans, mais c'est au conservatoire d'Alger, ma ville natale, que j'ai étudié le chant. Je maitrise deux instruments, la mandoline et le kuitra, variante algérienne de l'oud. J'étais biologiste de formation, mais en 1992, j'ai entrepris une carrière d'artiste pour me consacrer à ma passion. Je suis interprète de noubas, partie classique du répertoire arabo-andalou qui associe poésie, chant et musique.

La période florissante se situe du IXe au XIVe siècle. Poètes et poétesses développent des thèmes sur l'amour ou la beauté de la nature et des jardins. Une princesse andalouse qui était aussi poétesse organisait un salon littéraire où elle invitait des artistes. Elle déclare son amour à lbn Zeydoun — également mathématicien et philosophe —, une histoire que j'ai chantée dans un de mes albums.

 

Est-il important, pour vous, de mettre en avant les femmes ?

Oui, les femmes osaient parler d'amour, étaient à l'égal des hommes. J'ai envie de transmettre ce savoir-vivre et ce patrimoine, de mettre en lumière le rôle des femmes qui l'interprétaient avant d'être écartées complètement. Après la chute de Grenade, ces artistes se sont déplacés vers le Maghreb où il y a eu une continuité. Femmes et hommes, de cultures arabe, berbère ou juive, vivaient ensemble sans faire de différence.

 

Comment ce concert a-t-il vu le jour ?

II y a deux ans, avec le projet Demos, au conservatoire d'Angers. Après avoir rencontré Ramzi Aburedwan, nouveau chef de l'0rchestre arabo-andalou de l'Anjou, le projet s'est fait rapidement. Le collectif d'une trentaine de musiciens et chanteurs, professionnels et amateurs partagent la même passion pour les musiques du Maghreb, du Moyen-0rient, de l'Europe orientale. Parmi eux, certains connaissent le registre arabo-andalou. Ramzi m'a demandé de monter le concert autour de noubas, avec quelques pièces du Moyen-0rient.

C'est une belle aventure artistique de faire découvrir ma musique à d'orchestre comme au public. L'interprétation se fonde sur l'écoute des instrumentistes et une attention réciproque. A chaque concert, on donne le meilleur, j'ai hâte de rencontrer le public nantais à l'opéra Graslin.

 

Recueilli par Roberte Jourdon
"OUEST-FRANCE" NANTES mercredi 8 mars 2023