Hommage à Wellada et les autres...
     
     
 

La majestueuse interprète de la musique andalouse vient de mettre sur le marché un nouvel opus dédié à la poésie féminine. Après nouba Mezmoum en 2004 et celle de Rasd en 2005, la chanteuse de musique andalouse a entamé récemment l'enregistrement de nouba Zidane qui entre ainsi dans le cadre du 2e volet de la série des 12 noubas. Disponible sur le marché depuis le 4 novembre dernier, nouba Zidane a été présentée au cours du mois de Ramadhan lors d'un concert-événement exceptionnel et unique pour ce mois de carême.

Dans cette nouba, on y trouve un inqilab, Ya racha fettan, un m'cedder soufi de Sidi Boumediène Tahya bikoum koullou ardhin, un btayhi, Lach ya adhab el qouloub, un istikhbar, Alâ hal la-na min bâadi atafarruqi, un derdj, El louz fateh, et trois insiraf, à savoir: âtir El anfes, Min houbbi had el ghazala et Dir el ôuqar, deux khlass: Ama tataqi Ellah et Selli houmoumek, et enfin une qadrya: Memhoun men elli hedjerni.

Comme d'habitude, le CD est accompagné d'un livret contenant les textes des q'çaids en arabe et leur traduction en français toujours faites par Saâdane Benbabaali, professeur en littérature arabe à Paris IIIe, spécialiste du mouwachah, avec qui Beihdja Rahal travaille depuis quelques années.

Une des particularités de cette nouba Zidane est l'interprétation d'un poème de Wellada Bint El Moustakfi. «On ne parle jamais de poétesses. Elles étaient pourtant du même rang, à l'époque, que les poètes masculins. C'était une princesse andalouse. Elle organisait des cercles poétiques et des salons littéraires pour femmes chez elle. Parfois, des poètes hommes y avaient accès. Un jour, Ibn Zeydoun s'y est rendu. Il en est tombé amoureux. Il lui a écrit et lui a déclaré son amour. Elle a répondu par un poème où elle lui déclare aussi sa flamme. Depuis, est née entre eux une correspondance; l'histoire dit aussi qu'il l'a trompée avec sa gouvernante. Elle a donc arrêté de lui écrire. Lui, continuait sa correspondance, même en étant en prison, jusqu'à sa mort, sans recevoir aucune réponse de Wellada»,

et de renchérir: «Wellada était à l'époque très connue, pourvue d'un haut niveau intellectuel. Pourquoi donc on arrive à chanter Ibn Zeydoun, Ibn Khafadja, Ibn Labaana, Ibn Zoumrok et on ne chante pas les poétesses, à l'écriture tout aussi magnifique que celle des poètes masculins?

Je voulais par ce poème rendre hommage et faire découvrir cette poésie féminine andalouse. Je me suis dit que, pour les prochaines noubas, il y aura désormais un texte d'une poétesse», souligne Beihdja Rahal dont le souci est de préserver le patrimoine musical andalou en l'interprétant à sa manière, tout en restant la plus authentique possible du patrimoine andalou algérien. «Chaque nouba, je l'enrichis par un nouveau texte. D'ici 20 ans, je pourrais dire que j'ai tout enregistré dans le mode Zidane», explique-t-elle.

Abordant le sujet de «Alger, capitale de la culture arabe», l'événement que compte abriter notre pays en 2007, Beihdja Rahal souligne qu'un artiste a besoin de temps pour concrétiser et monter n'importe quel projet. «Ça ne se fait pas un ou deux mois avant qu'on lui en parle. Faire dans la précipitation équivaut à du bricolage. J'ai appris tardivement qu'on a demandé aux gens de déposer leur projet en mai 2006. Comment peut-on participer à "Alger, capitale de la culture arabe" quand on n'est pas au courant et quand, jusqu'à présent, personne ne vous contacte?», s'interroge, interloquée, la chanteuse de musique andalouse, ayant longuement fait ses preuves pourtant ici et à l'étranger.

«La musique classique algérienne, c'est à la limite, la carte de visite de l'Algérie. Je pense qu'il y a des intervenants incontournables. Je le pense en toute modestie!», achève de préciser Beihdja Rahal.

En attendant cet événement qu'abritera notre pays, il est bon d'aller acheter le disque de Beihdja Rahal. De la belle musique et de la qualité, au moins, assurées!

 

O. Hind
"L'EXPRESSION" jeudi 23 novembre 2006