Beihdja Rahal, « L'enseignement sauvegardera le patrimoine andalou »  
     
     
 

Elle est l'une des plus belles voix de la musique andalouse. Elle est sur plusieurs fronts avec comme souci principal de transmettre son savoir aux jeunes. Elle nous en parle.

 

Comment passez-vous la saison estivale ?

J'ai donné des concerts pendant le Ramadhan dans quelques wilayas. Je compte prendre quelques jours de vacances. Cela me permettra de me reposer car l'année a été chargée jusqu'en juin entre concerts, cours de musique et enregistrements.

 

Que pensez-vous des chanteurs qui animent des émissions culturelles et artistiques ?

Pourquoi pas. Les chanteurs font aussi du cinéma ou du théâtre. J'ai déjà joué dans la pièce de Slimane Benaïssa en 1997, « Les fils de l'amertume », en tournée dans toute la France durant une année et demie.

 

Quelle est la différence sur le plan technique, entre les écoles sanaâ, malouf et hawzi ?

Elles sont une richesse, chacune ayant sa particularité, ses mesures rythmiques. On parle de sanaâ d'Alger, du malouf de Constantine et du gharnati de Tlemcen. Le hawzi, qui est l'équivalent du âroubi et du mahjouz, est un dérivé de l'andalou.

 

Pour être un bon interprète de musique andalouse, quelles qualités faut-il avoir ?

Avant tout, il faut avoir une bonne et longue formation. Les interprètes sont nombreux, malheureusement, ils ne sont pas tous passés par toutes les étapes de formation qui feront d'eux des interprètes de haut niveau.

L'andalou et la nouba demandent des années d'études au conservatoire ou dans les associations. Il faut être patient et avoir beaucoup de rigueur pour essayer d'apprendre le maximum et de côtoyer les maîtres qui savent transmettre leur savoir.

 

Où en est votre démarche de sauvegarde du patrimoine ancestral ?

L'enseignement est une manière de sauvegarder le patrimoine andalou. C'est un devoir lorsqu'on a eu la chance, comme moi, d'apprendre ce patrimoine auprès des maîtres. A mon tour de transmettre ce savoir aux jeunes. La nouba avant tout mais aussi le hawzi et l'aroubi. Ils sont des dérivés qu'il faut préserver. Cette musique andalouse nous est parvenue depuis des siècles.

Depuis une vingtaine d'années, je donne des cours à l'ELCO pour les enfants et au sein de l'association Rythmeharmonie à des adultes passionnés. La sauvegarde et la préservation du patrimoine passent aussi par les enregistrements. Je suis à mon 25e album.

 

Que représentent pour vous Zoubir Karkachi, Mohamed Khaznadji et Abderezak Fakhardji ?

Le premier m'a appris à poser les doigts sur la mandoline. Il fut mon premier professeur au conservatoire d'El Biar. C'est grâce à ces maîtres que je suis ce que je suis. Ils m'ont appris la rigueur et le respect, je ne peux que leur rendre hommage.

 

Vous avez publié deux ouvrages en 2008 et en 2010. Comptez-vous récidiver avec un nouveau livre ?

Le troisième ouvrage est pratiquement terminé. Avec Saadane Benbabaali, nous pensons le publier dès qu'il sera prêt. Le but n'est pas juste de participer au salon du livre, mais de partager nos connaissances avec les passionnés de poésie et de musique.

 

La musique arabo-andalouse est l'une des grandes sources de la culture algérienne. N'est-ce pas ?

Le hawzi et l'aroubi sont des dérivés de la nouba. Les chanteurs de chaâbi se sont inspirés de la musique andalouse pour écrire et composer les qassidate. La jeune génération aussi s'inspire de l'andalou.

 

Quel est votre livre de chevet ?

Je viens de commencer « le Rempart » de Me Ali Haroun.

 

Des projets en cours ?

Je serai le 17 septembre en Ile-de-France pour un spectacle algéro-espagnol. C'est une collaboration avec Albert Recasens, musicien et compositeur espagnol avec qui j'ai donné un concert l'année dernière au palais de l'Alhambra à Grenade, en Andalousie. C'était lors de la commémoration de la mort d'Inigo Lopez de Mendoza, deuxième comte de Tendilla et premier gouverneur de l'Alhambra.

Ensuite, je donne un concert le 3 novembre à Genève puis à Epinay-sur-Seine, le 4 décembre. J'entame aussi mon prochain album.

 

Samira Sidhoum
"HORIZONS" vendredi 29 juillet 2016