Je reconnais que ma voix n'a pas traversé les frontières de la capitale

     
     
 

Malgré sa célébrité à l'étranger, l'artiste Beihdja Rahal n'est toujours pas connue chez elle dans toute l'Algérie. Les causes, elle nous en a parlé dans un entretien qu'elle a accordé à «El Khabar» lors d'une visite qu'elle a effectuée au siège du journal.

 

Un nouvel album, quelles particularités par rapport aux précédents ?

J'ai choisi de chanter des textes de poétesses, la poésie féminine n'est pas beaucoup prise en considération et comme dans ma nature j'aime l'originalité et refuse l'imitation ainsi que les nouvelles tendances musicales juste parce que c'est à la mode. La poésie de la princesse et poétesse Wellada Bint El Moustakfi m'a beaucoup attirée, elle organisait des salons et cafés littéraires chez elle pour lire sa poésie à l'assistance composée de poètes. Ibn Zeydoun était un fervent admirateur de Wellada et de sa poésie.

Mon dernier album que j'ai nommé « nouba zidane » comporte onze titres des différents mouvements de la musique andalouse dans ce mode zidane comme l'inqilab, le mceddar, le btaïhi, l'istikhbar, le derdj, le khlass et la qadrya. J'ai accompagné mon album d'un livret où on peut lire la poésie en arabe et la traduction en français faite par le professeur Saâdane Benbabaâli qui donne des conférences dans une université française.

 

Concernant la promotion, Vous chantez souvent le contenu de l'album pour la première fois en Algérie en priorité. Est-ce de la fidélité ?

Effectivement, ça devient une tradition que je compte maintenir. L'Algérie est ma première et principale escale, la promotion de mes albums doit commencer ici, la priorité revient automatiquement au public algérien qui sait apprécier l'art andalou.

 

Comment expliquez-vous le fait que vous n'avez pas été sollicitée aux manifestations du dernier festival de musique andalouse que l'Algérie a organisé dernièrement ?

Je ne suis pas la seule à ne pas avoir reçu d'invitation, malgré cela j'ai assisté à quelques concerts pour avoir une idée sur le niveau artistique. Nous devons profiter de ce genre de manifestations pour faire le bilan : Il y a beaucoup d'efforts et de travail à faire pour nos associations musicales, comparées aux troupes étrangères qui se sont succédé, nous devons profiter de leurs expériences dans ce domaine. Il nous reste à revoir le rapport que nous avons et la place que nous donnons à notre patrimoine musical andalou et comment le faire revivre et présenter son plus beau visage.

 

Vous ne pensez pas que les algériens en général n'apprécient plus le genre andalou ?

Cette idée était peut-être répandue dans le passé, on disait que la musique andalouse n'était écoutée et appréciée que par une minorité avertie et d'un âge avancé. La réalité en ce qui concerne Alger en particulier prouve que le public a pris conscience de l'importance de cet art andalou.

 

Vous avez beaucoup œuvré en France, parlez-nous de cette expérience.

Quand je me suis installée en France, je n'étais pas du tout connue en Algérie. Je sais que plusieurs parmi les artistes algériens qui se sont installés en France en quête de célébrité l'avait déjà auprès du public algérien avant leur départ, ce n'était pas du tout mon cas. Ma carrière artistique, je l'ai commencé en France et non pas en Algérie. Malgré cela, je n'ai jamais coupé le cordon ombilical avec mon pays. Je continue à y aller régulièrement pour des séjours ou pour donner des concerts.

Je continue à croire complètement que l'adresse d'un artiste est là où il trouve sa source d'inspiration. Ma passion pour le chant est partout. Lorsque je suis à Alger par exemple et que je regarde par le balcon, la vue de la mer me fascine quand la lumière s'y reflète ce qui me donne une grande inspiration. A Paris, capitale du monde, je retrouve toute la force de ma voix et la douceur des mélodies.

 

Etant résidante à l'étranger, Qu'avez-vous fait pour sauvegarder le patrimoine andalou ?

J'ai toujours voulu créer des rencontres avec des artistes de musique andalouse dans le monde, j'ai refusé le métissage avec d'autres genres musicaux. J'ai fait des duos dans le but d'échanges d'idées et de faire connaître la musique classique algérienne, je parle dans ce cas là de « mariage » de deux genres classiques.

Je me rappelle, à ce propos, de l'occasion qui m'a été donnée en 2001, de rencontrer le guitariste espagnol Juan Martin lors d'un concert en commun où le flamenco a rencontré l'andalou algérien. J'ai aussi chanté avec d'autres artistes espagnols, des italiens et d'autres pays européens. Pour moi, le message est de faire connaître fidèlement cette musique andalouse algérienne en respectant son authenticité sans la changer.

 

Du nouveau pour bientôt ?

Je prépare un nouvel album musical que je compte enregistrer au mois de février prochain.

 

 

Djamila Chaer
"EL KHABAR" samedi 6 janvier 2007